The good Girls, un meurtre ordinaire, Sonia Faleiro, Editions Marchialy.

 The Good Girls, un meurtre ordinaire

Sonia Faleiro

Traduction : Nathalie Peronny

Présentation de l'éditeur : 

Un soir de mai 2014, dans un petit village du nord de l'Inde, deux adolescentes, amies et cousine, sortent faire un tour dans les champs à proximité de leur maison. Elles ne reviendront jamais. A l'aube, leurs corps sont retrouvés pendus dans le verger derrière chez elles? Que s'est-il réellement passé durant ces quelques heures ? La vérité semble moins importante pour leur famille et les habitants de ce village que la rumeur qui enfle déjà. Il faut sauver l'honneur, à tout prix. 
A partir de ce fait divers glaçant, Sonia Faleiro raconte les mécanismes d'une société très hiérarchisée où la femme n'est jamais maître de son destin. Grâce à une enquête minutieuse, elle parvient à rétablir la vérité occultée et à écouter  ce que ces deux  jeunes femmes ont à nous dire. 


Mon avis : 

Waouh ! Quelle plongée dans l'Inde moderne et pourtant encore tellement attachée aux traditions ancestrales ! 
Il aura fallu 4 ans à la journaliste Sonia Faleiro pour boucler son enquête. 4 ans de travail acharné, de voyages à travers ce pays gigantesque, d'interviews, de recherche documentaire. Sonia Faleiro est partie d'un fait divers glaçant : la découverte de deux fillettes pendues à un arbre, alors qu'elles allaient se soulager dans un champ proche de chez elles. L'histoire se passe en 2014. 


Roman, enquête criminelle et sociologique, thriller, The Good Girls, c'est tout ça à la fois. Sonia Faleiro profite donc de ce faits divers pour décrire la condition des femmes en Inde. Ce gigantesque pays émergent mais qui peine encore à leur donner une vraie place, surtout dans les campagnes. Ne pas sortir seule, pas de téléphone portable, accès réduit aux études et bien sûr, il y a l'honneur de la famille. 

"Sohan Lal l'avait dit lui-même à la Dr Srivastava. A la question "si les filles avaient été retrouvées vivantes, qu'auriez-vous fait pour laver l'honneur de votre famille ?", il avait répondu par ces mots : "On les auraient tuées."

Ce passage, à lui seul, résume l'impasse dans laquelle se retrouve les filles indiennes victimes d'agressions. Au final, elles sont toujours coupables. D'ailleurs le sous-titre "un meurtre ordinaire" est très évocateur. 

"Les filles sont l'honneur de la famille".

Quel paradoxe ! Elles qui ont une place secondaire dans la société indienne, subissent une énorme pression familiale. Se sont sur les épaules que reposent tout l'honneur des familles. Et quiconque met en péril cet honneur, peut être assassiné. Cela prouve donc l'extrême importance apporté à cet honneur. C'est un gage de survie dans ce système organisé en castes. 

Un système pauvre et gangréné par la corruption

Dans The Good Girls, Sonia Faleiro décrit aussi une société pauvre, sans moyens techniques et financiers, dans laquelle les policiers sont obligés de rouler avec leur propre véhicule, doivent eux-mêmes remplir leur réservoir. Un système dans lequel un balayeur peut autopsier un corps, tout ça parce qu'il a l'habitude de nettoyer la salle d'examen ! On croit rêver. 

Sonia Faleiro en profite aussi pour égratigner policiers et politiciens corrompus, qui s'enrichissent aux frais de l'état, en appauvrissant la population qu'ils sont sensés protéger. Ce système qui pollue les enquêtes criminelles, dirigées comme un véritable sketch. C'est assez édifiant et incroyable. 

Le viol de 2012

Après l'immonde agression dont a été victime la jeune étudiante en 2012 et la série de mesures qui a suivie, l'Inde a tenté de mettre en avant les milliers de viols que subissent les femmes en Inde chaque jour et pour lesquels, très peu d'agresseurs sont punis. 
Le viol du bus de Delhi plane sur cette enquête et l'on sent malgré tout une certaine pression de l'opinion publique sur le gouvernement. 
Mais, on ne bouscule pas un système pluri-séculaire en quelques mesurettes (d'ailleurs pas toujours suivies de faits) ministérielles. Pour que la condition de la femme évolue nettement, il faudra sûrement (hélas) plusieurs années encore. 

Pour aller plus loin, je ne peux que vous conseiller l'excellente série sur le viol du bus : 




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