New Ibéria blues, James Lee Burke, Rivages noir.

 Même quand il était sans le sou, Desmond Cormier a toujours cru à son destin. Aujourd'hui il est l'un des grands d'Hollywood. Revenu dans sa Louisiane natale, pour tourner son nouveau film, il séjourne dans sa magnifique maison en bordure de la baie. Dave Robicheaux, qui le connaît depuis longtemps, lui rend visite. Mais en regardant la mer à travers le télescope de Cormier, Dave a une vision aussi surréaliste que terrifiante : une jeune femme noire ligotée à une croix de bois se balance au gré des vagues. Un crime abominablement mis en scène qui n'est que le premier d'une longue liste. Chaque fois, le meurtrier semble prendre le soin de disposer le corps de ses victimes en fonction des suites du tarot. 

Aux côtés de sa nouvelle équipière, Robicheaux va aller de mensonges en faux-semblants, se confronter à la violence et à la peur, à la nécessité de pardonner, à la mort d'êtres aimés. 



Chaque année j'attend avec impatience le nouveau "Robicheaux".   Cependant, la lecture du quatrième de couverture laissait présager un sentiment de déjà vu avec "Dans la brume électrique avec les morts confédérés". De fait, pendant toute le roman, je n'ai pu m'en défaire tant les parallèles sont nombreux : le cinéaste et le film en tournage, les acteurs, les visions, les meurtres sauvages, les manipulations, la nouvelle équipière, les collègues véreux...Ce nouveau roman de James Lee Burke ne serait qu'un mauvais remake de "Dans la brume..." ? Quand même pas mais on dirait que l'auteur s'est économisé ou bien commence à faire patiner Robicheaux dans la choucroute. 

Ce "New Ibéria Blues" est toutefois un très bon roman pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas "Belle mèche". L'écriture de Burke est toujours aussi merveilleuse, les descriptions de paysages nous plongent dans les bayous et la chaleur moite de la Louisiane, les personnages sont tous singuliers avec leur part de défauts et de brisures, les dialogues toujours bien cisaillés. Bref, tout ce qui a fait la magie de l'auteur est bien présente ici. 

Et pourtant, la magie n'a pas opéré cette fois-ci. On sent que Dave vieillit. Et que dire de cette amourette avec sa nouvelle équipière, même pas la trentaine alors que l'inspecteur doit avoir près de 80 ans maintenant ! Bien sûr l'auteur n'évoque jamais l'âge de son héros mais si on compte bien et qu'on relève tous les indices, on ne doit pas être loin du compte. Sachant qu'il discutait avec son père en 1940, qu'il a fait la guerre du Vietnam, on y est. Le temps de la retraite aurait-il sonné ? 

Malgré ça, Dave en pince pour Bailey. Et les sentiments sont bien réciproques. Mais sait-il qui elle est vraiment ? Pourquoi essaie-t-on de l'alerter sur son passé ? Est-celle vraiment celle qu'elle paraît être ? 

Je sors de cette lecture avec un sentiment partagé, mitigé. J'ai bien aimé retrouver notre lieutenant préféré, qui se bat avec ses vieux démons, avec ses bondieuseries parfois agaçantes, avec sa façon aussi de donner des leçons. J'ai bien aimé retrouver aussi l'atmosphère propre à James Lee Burke : les bayous et la Louisiane. L'intrigue est plutôt bien troussée, comme d'habitude je dirais, avec des une frontière entre les bons et les méchants qui fluctue, qui est très floue. 

Mais, j'ai eu l'impression de relire "Dans la brume électrique..." et de voir dépérir Robicheaux. Pendant de nombreux livres l'auteur a su nous faire oublier l'âge de son héros mais aujourd'hui, on en vient à se dire qu'il est trop vieux car James Lee Burke vit aussi avec son temps et plonge ses récits dans le maintenant. Ce qui rend le décalage trop violent. 

Disponible aux éditions Rivages. 


 

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